Les cahiers de l'Islam
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Sterenn Le Maguer
Actuellement en doctorat d'archéologie islamique et enseignante à l'Université Paris 1... En savoir plus sur cet auteur
Dimanche 3 Mars 2013

Entre syncrétisme artistique et affirmation d’une identité propre : le décor architectural de la Grande Mosquée Sultan al-Qaboos (Mascate). Partie 1/2



Menant actuellement ses recherches en Oman, l'auteur nous fait partager sa visite de la Grande Mosquée du Sultan al-Qaboos située à Mascate.

La Grande Mosquée du Sultan al-Qaboos résume à elle seule près de 1400 ans d’art et d’architecture islamique. Ouverte en 2001, couvrant 40 000 mètres carrés, encadrée de murs et dotée de cinq minarets atteignant 91,5 m de haut, et dominant de son dôme doré l’horizon de Mascate, cette mosquée fascine d’abord par ses dimensions.



Entre syncrétisme artistique et affirmation d’une identité propre : le décor architectural de la Grande Mosquée Sultan al-Qaboos (Mascate). Partie 1/2

 L’entrée se fait par une petite cour au milieu de laquelle se trouve une fontaine, puis l’on entre dans un jardin avec pelouses, arbres en fleurs et fontaines. Ce type de jardin évoque à la fois l’art des jardin andalous et perses.





Entre syncrétisme artistique et affirmation d’une identité propre : le décor architectural de la Grande Mosquée Sultan al-Qaboos (Mascate). Partie 1/2
Nous commençons la visite par la salle de prière secondaire. L’extérieur est ceint d’une galerie dont les voûtes en encorbellement sont ornées d’arabesques sculptées dans la pierre blanche. A l’intérieur, le plafond à caisson est richement décoré. Bien que les portes soient surmontées de vitraux multicolores sertis au plomb qui laissent filtrer une douce lumière, l’éclairage se fait grâce à d’impressionnants luminaires.



L’intérieur de la salle de prière principale (c) S. Le Maguer 2012
L’intérieur de la salle de prière principale (c) S. Le Maguer 2012
La salle de prière principale est la plus imposante. Elle peut accueillir plus de 6500 fidèles et son dôme s’élève à 50 m de hauteur. Le sol est recouvert d’un tapis réalisé dans le Khorasan mesurant 60 m par 70 m de côtés. Sous le dôme, un lustre comportant 35 chandeliers et fait de cristaux Swarosky assure l’éclairage de la salle. Mais ce qui nous intéresse dans cette salle, c’est la présence des muqarnas. C’est sans doute l’un des éléments les plus représentatifs de l’architecture islamique. Il est commun de l’Andalousie à l’Asie Centrale. A la base, cet élément, appelé trompe d’angle, a une fonction architecturale précise puisqu’il permet à une base carrée de supporter un dôme circulaire. Les muqarnas sont une évolution de ces trompes en un élément purement décoratif. On le trouve aussi parfois dans la littérature sous le terme de “stalactites”. Dans le cas de la mosquée Sultan al-Qaboos, cet élément est utilisé comme élément architectural, mais aussi comme élément décoratif caractéristique de l’art islamique, et il vient décorer le mirhab sur le mur de qibla.

Détail d’une trompe d’angle avec muqarnas (c) S. Le Maguer 2012
Détail d’une trompe d’angle avec muqarnas (c) S. Le Maguer 2012



Le mirhab (c) S. Le Maguer 2012
Le mirhab (c) S. Le Maguer 2012



Revenons à l’extérieur. La cour principale est doté de plusieurs iwâns. Ces arches, qui fonctionnent généralement par quatre, sont un des éléments caractéristiques de l’architecture sassanide. Le palais de Ctésiphon (Iraq) possède ainsi une cour à quatre iwâns. Cet élément est repris dans l’architecture islamiques. On le retrouve le plus souvent dans les cours des mosquées ou des madrasa. Ici les iwâns sont ouverts, ceux situées au sud ouvrent sur la montagne
Iwâns donnant sur les montagnes (c) S. Le Maguer 2012
Iwâns donnant sur les montagnes (c) S. Le Maguer 2012


Enfin, les murs nord et sud possèdent chacun une galerie longue de 240 m. Ces galeries sont divisées en 12 espaces différents. Chaque espace est orné d’un décor mural représentant un type de décor islamique. Nous trouvons ainsi représentés l’art byzantin et des débuts de l’Islam au Levant, l’Egypte et la Mésopotamie, l’art mamelouk, l’art moghol, l’art ottoman, l’art maghrébin, Samarcande et l’art timouride, la Perse safavide, deux interprétations contemporaines de l’art de l’Islam, des motifs tribaux du Hedjaz et enfin Oman et péninsule Arabique : le sable, la myrrhe et l’argent qui fera l’objet de la seconde partie de ce billet.

Niche avec décor de mosaïques (c) S. Le Maguer 2012
Niche avec décor de mosaïques (c) S. Le Maguer 2012




Ce décor mural évoque aussi bien les mosaïques couvrant le Dôme du Rocher à Jérusalem, que les murs de la Mosquée des Omeyyades à Damas.

Décor de style mamlouk (c) S. Le Maguer 2012
Décor de style mamlouk (c) S. Le Maguer 2012




Cette niche évoque le décor architectural mamlouk caractérisé par des alternances de pierres de couleurs différentes, que l’on retrouve aussi bienen Egypte, en Syrie et en Turquie.


Ainsi, la volonté d’inscrire cette mosquée dans la longue tradition de ces lieux de prières s’est fait dans le programme architectural de ce bâtiment. Cela n’est pas surprenant lorsque l’on sait que vit en Oman une importante minorité baloutche, et que viennent aussi y travailler une nombreuse main d’oeuvre immigrée, en particulier indienne et pakistanaise. A travers l’architecture de cette mosquée, chaque musulman, indépendamment de son origine géographique, peut se sentir chez lui dans cette mosquée. Il y retrouvera des décors et des formes qui lui sont familières. Cette volonté d’ouverture est explicité dans l’un des panneaux explicatifs consacré intitulé “Contemplation on the Islamic Theme” : “La virtuosité de l’art Islamique présente une infinité d’expressions par le dessin, sans tenir compte de la provenance ou de l’époque. Il n’y avait pas de frontière dans l’art et l’architecture islamiques”. La mosquée du Sultan al-Qaboos rend, à travers son art, hommage à l’art islamique passé et à celui à venir, toujours fait des rencontres et des voyages de ses artistes et de ses commanditaires.

Article publié avec l'aimable accord de Sterenn Le Maguer, lien d'orgine.
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