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Vendredi 27 Juin 2014

[LeMonde] - Il faut enseigner l'arabe dans le service public

Par Joseph Dichy (enseignant) et Pierre-Louis Reymond (enseignant),
Cet article a été publié par "LeMonde.fr, le 11 février 2014", il reste d'actualité.




Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale, a affirmé à plusieurs reprises son intérêt et son soutien à l'enseignement de l'arabe dans le service public. En dépit de ce soutien et de la vision très juste qui est la sienne, le capes d'arabe est aujourd'hui fermé ! Face à l'enjeu historique qui est celui de l'enseignement de l'arabe en France, on ne peut faire aujourd'hui l'économie d'un débat public.
 
Cette décision vient une fois de plus confirmer l'abandon du terrain de l'enseignement de l'arabe par le service public laïc. Une absence aussi flagrante de politique concertée ne peut que renforcer la « sous-traitance » de fait de l'enseignement de l'arabe à un secteur associatif qui l'enferme dans une logique identitaire et communautaire.
 
Il en résulte une grave désorganisation de l'offre du service public : la demande existe bien, puisque presque 50 000 élèves suivent des enseignements d'arabe dans le primaire, avec des instituteurs algériens, marocains et tunisiens (dans le cadre des enseignements de langues et culture d'origine). Or ces élèves ne sont qu'un peu plus de 9 000 au collège et au lycée, dans le cadre normal de l'enseignement des langues. Les parents, de demandes rejetées en rebuffades, se détournent du service public laïc. On les comprend.

NE DETOURNONS PAS LES PARENTS DU SERVICE PUBLIC
 
Mais l'arabe est en outre une grande langue internationale et la langue d'une grande culture universelle : la France est le seul pays du monde occidental à l'enseigner à tous les niveaux, de l'école primaire à l'université et aux grandes écoles. La langue arabe est enseignée dans près de 25 universités. De 6 000 à 8 000 étudiants en font chaque année le choix en tant que matière principale.
 
Parmi ces derniers, un tiers environ est inscrit en langues étrangères appliquées, filière dont la visée est professionnelle. Les Instituts d'études politiques (Sciences-Po), Polytechnique, Centrale, les ENS (Ulm, Lyon, Cachan) et bien d'autres grandes écoles enseignent cette langue, avec, en plusieurs lieux, des diplômes ou des Masters spécialisés. Rappelons aussi que les classes préparatoires aux grandes écoles comptent en arabe plusieurs centaines d'élèves.
 
A l'enjeu sociétal lié à l'idéal de laïcité que nous venons de mentionner répond parallèlement un grand enjeu économique et commercial : le monde arabe est notre premier partenaire d'échanges économiques.
 
Avec les pays du Maghreb, des accords de coopération culturelle mettent en parallèle la francophonie – avec un enseignement du français dans les pays partenaires – et l'enseignement de l'arabe en France. En l'absence d'une politique de réciprocité, l'avenir de ces échanges culturels et linguistiques risque, tôt ou tard, de se trouver compromis, avec des conséquences économiques non négligeables.
 
Pourquoi les enseignements d'arabe en collège et lycée ne suivent-ils pas ? Pour répondre à cette question, il faut analyser les mécanismes aveugles qui conduisent à l'étrange absence de prise en compte des besoins que l'on observe.
 
A l'appui de la fermeture du capes, on nous rétorque que les besoins de professeurs d'arabe dans l'enseignement secondaire seraient satisfaits, voire que ces enseignants seraient en surnombre. On se demande bien alors pourquoi on en revient aujourd'hui à recruter des contractuels d'arabe, comme au temps des « maîtres-auxiliaires » !
 
Un exemple flagrant de la négligence structurelle qui conduit à cette situation est l'absence de prise en compte par la direction des ressources humaines du ministère de l'éducation des 60% de professeurs d'arabe demeurés « TZR » (titulaires sur zone de remplacement). Voilà un sigle à retenir : il correspond à des postes provisoires prévus pour les remplacements.
 
 UNE SITUATION SCANDALEUSE
 
Alors que ce type de poste ne dépasse pas normalement 5% d'une discipline, l'arabe, avec sa proportion de 60%, fait figure de champion. Ces postes de remplaçants sont détournés de leur fonction pour pallier l'absence de créations de postes budgétaires en arabe par les Rectorats, depuis plus de 20 ans.


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