Cet article a déjà fait l'objet d'une publication dans la revue Annales de Géographie, t.8, 38 | 1899, sous licence Creative Commons (BY NC ND) sur le portail Persée.
Datant de la fin de XIXe siècle et utilisant un vocabulaire colonialiste, l'auteur retrace les dynamiques d'implantation des colonies juives et allemandes en Palestine.
Datant de la fin de XIXe siècle et utilisant un vocabulaire colonialiste, l'auteur retrace les dynamiques d'implantation des colonies juives et allemandes en Palestine.
Par Pierre Mille
Les grandes puissances européennes ont en Palestine, comme partout ailleurs dans l'Orient méditerranéen, des intérêts politiques et économiques; mais ce qui constituait jusqu'ici pour la Palestine une originalité, c'est que ces intérêts n'existaient pour ainsi dire qu'en fonction de l'importance religieuse de la Terre Sainte aux yeux des nations chrétiennes.
La principale, et pour ainsi dire la seule fortune de la Palestine proprement dite, c'étaient ses souvenirs, et pour la Galilée, pays plus riche, la situation était pourtant sensiblement la même.
Une population fixe de moines, de religieuses et de pasteurs ; une foule nomade de pèlerins appartenant à toutes les confessions chrétiennes : Catholiques latins, Grecs orthodoxes, Melkites, Maronites, Coptes, Coptes unis, Arméniens, Arméniens unis, Abyssins, Luthériens, Calvinistes, Anglicans, Wesleyens, etc., formaient le fond des consommateurs et des producteurs de la Palestine. Comme consommateurs, ils bâtissaient et multipliaient des chapelles, des églises, des couvents, des écoles, d'immenses hospices pour les pèlerins; achetaient leur nourriture. Et ils produisaient des aumônes : je veux dire qu'ils recevaient les dons de la charité enthousiaste et inépuisable de l'Europe chrétienne. En grande partie les populations indigènes vivaient de ces dons, reversés sur elles.
Il en est encore ainsi aujourd'hui. Les communautés religieuses sont même plus florissantes qu'elles ne l'ont jamais été. Mais un phénomène nouveau s'est produit dans ces dernières années : aux éléments religieux que l'Europe envoyait en Palestine, sont venus se juxtaposer des éléments laïques. Je veux parler des colonies agricoles juives et allemandes. Et ceci ne sera pas peut-être sans influence sur l'attitude diplomatique de certains États dans l'avenir.
La principale, et pour ainsi dire la seule fortune de la Palestine proprement dite, c'étaient ses souvenirs, et pour la Galilée, pays plus riche, la situation était pourtant sensiblement la même.
Une population fixe de moines, de religieuses et de pasteurs ; une foule nomade de pèlerins appartenant à toutes les confessions chrétiennes : Catholiques latins, Grecs orthodoxes, Melkites, Maronites, Coptes, Coptes unis, Arméniens, Arméniens unis, Abyssins, Luthériens, Calvinistes, Anglicans, Wesleyens, etc., formaient le fond des consommateurs et des producteurs de la Palestine. Comme consommateurs, ils bâtissaient et multipliaient des chapelles, des églises, des couvents, des écoles, d'immenses hospices pour les pèlerins; achetaient leur nourriture. Et ils produisaient des aumônes : je veux dire qu'ils recevaient les dons de la charité enthousiaste et inépuisable de l'Europe chrétienne. En grande partie les populations indigènes vivaient de ces dons, reversés sur elles.
Il en est encore ainsi aujourd'hui. Les communautés religieuses sont même plus florissantes qu'elles ne l'ont jamais été. Mais un phénomène nouveau s'est produit dans ces dernières années : aux éléments religieux que l'Europe envoyait en Palestine, sont venus se juxtaposer des éléments laïques. Je veux parler des colonies agricoles juives et allemandes. Et ceci ne sera pas peut-être sans influence sur l'attitude diplomatique de certains États dans l'avenir.
Quand on va de Jaffa à Jérusalem, et surtout quand on approche de cette dernière ville, on rencontre sur les routes un nombre considérable d'êtres humains dont l'apparence, sous ce climat, a quelque chose d'incohérent. On s'attend à tout : à voir des Bédouins mal lavés et dont le pigment est bruni; des Syriens élégants et un peu mous; des Turcs paresseux à la carrure large et aux gestes lourds; des nègres même, comme à Constantinople. On compte frôler beaucoup de guenilles, mais a condition que ces guenilles soient conventionnellement orientales. En cherchant bien, je ne dis pas qu'on ne découvre tout cela: des Bédouins, des Syriens, des Turcs, des nègres et des haillons. Mais la majorité des gens qui vous croisent sont vêtus d'une extraordinaire houppelande, plus ou moins polonaise, et coiffés d'une casquette en peau de lapin ou d'un affreux petit chapeau noir en feutre mou. Sous ce couvre-chef, au lieu des faces tannées et hâlées qu'on cherche, apparaissent, entre des longues boucles graisseuses, des ligures misérablement septentrionales, d'un rose triste et malsain, - le rose strumeux bien connu des médecins qui soignent les pauvres scrofuleux de nos grandes villes. Ce sont des Juifs de Pologne, de Roumanie et de Bulgarie.
Il y a des siècles que les Juifs d'Europe ont les yeux tournés vers la cité de David. Beaucoup, parmi ceux qui ont conservé pure la foi des ancêtres rêvent, non pas d'y vivre mais d'y mourir. On sait en effet que c'est une croyance générale chez eux que le jugement suprême ayant lieu dans la vallée de Josaphat, ceux qui seront loin de Jérusalem devront faire sous terre tout le chemin qui séparerait leur tombe de cette vallée. Il est assez naturel que certains Israélites préfèrent accomplir ce voyage de leur vivant et en plein air. Le sionisme est donc une chose qui existe et qui existait bien avant qu'on en parlât, et que des lettrés israélites s'assemblassent en congrès pour prononcer des discours et recueillir des cotisations. D'après la Géographie Universelle d'Élisée Reclus, les juifs seraient, en Palestine et Galilée, au nombre de 40 000. Or, en 1898, les statistiques officielles, ou plutôt les estimations officielles du gouvernement turc donnaient, pour la population juive, les chiffres suivants :
Jérusalem...............28 112 Haïfa..........................810
Hébron.....................1 429 Tibériade...............3 200
Jaffa...........................2 970 Safed.................... 6 680
Gaza...............................75 Naplouse, etc......... 130
Ramleh........................166
C'est-à-dire un total de 43 542 Israélites. Je n'ai pu obtenir des chefs de communautés juives des renseignements suffisamment certains sur la proportion des immigrants d'Europe contre celle des immigrants sans qualification : car il est aussi a Jérusalem des Israélites qui sont venus, soit de la très ancienne et très riche communauté de Damas, soit surtout de la Mésopotamie et de l'Yémen. Ceux-ci, surtout, ont un type très pur et très caractéristique. ln fait seulement est certain, c'est que les statistiques ottomanes sont notablement inférieures à la réalité. L'impôt principal étant la capitation, tous les habitants de la Palestine comme ceux de tout l'empire ottoman d'ailleurs, ne tiennent nullement à donner des informations exactes aux commissaires de recensement Un religieux catholique français qui est occupé depuis longtemps de cette question et qui collationné divers renseignements estime que la population de Palestine et Galilée est actuellement de un million habitants qui se décomposent ainsi par races :
Bédouins et nomade ................................50 000
Musulmans Druses Métoualis ................800 000
Chrétiens de toutes sectes .....................100 000
Juifs ..................................................... 80 000
Païens (une secte persane Acca)........... 200
Il y a des siècles que les Juifs d'Europe ont les yeux tournés vers la cité de David. Beaucoup, parmi ceux qui ont conservé pure la foi des ancêtres rêvent, non pas d'y vivre mais d'y mourir. On sait en effet que c'est une croyance générale chez eux que le jugement suprême ayant lieu dans la vallée de Josaphat, ceux qui seront loin de Jérusalem devront faire sous terre tout le chemin qui séparerait leur tombe de cette vallée. Il est assez naturel que certains Israélites préfèrent accomplir ce voyage de leur vivant et en plein air. Le sionisme est donc une chose qui existe et qui existait bien avant qu'on en parlât, et que des lettrés israélites s'assemblassent en congrès pour prononcer des discours et recueillir des cotisations. D'après la Géographie Universelle d'Élisée Reclus, les juifs seraient, en Palestine et Galilée, au nombre de 40 000. Or, en 1898, les statistiques officielles, ou plutôt les estimations officielles du gouvernement turc donnaient, pour la population juive, les chiffres suivants :
Jérusalem...............28 112 Haïfa..........................810
Hébron.....................1 429 Tibériade...............3 200
Jaffa...........................2 970 Safed.................... 6 680
Gaza...............................75 Naplouse, etc......... 130
Ramleh........................166
C'est-à-dire un total de 43 542 Israélites. Je n'ai pu obtenir des chefs de communautés juives des renseignements suffisamment certains sur la proportion des immigrants d'Europe contre celle des immigrants sans qualification : car il est aussi a Jérusalem des Israélites qui sont venus, soit de la très ancienne et très riche communauté de Damas, soit surtout de la Mésopotamie et de l'Yémen. Ceux-ci, surtout, ont un type très pur et très caractéristique. ln fait seulement est certain, c'est que les statistiques ottomanes sont notablement inférieures à la réalité. L'impôt principal étant la capitation, tous les habitants de la Palestine comme ceux de tout l'empire ottoman d'ailleurs, ne tiennent nullement à donner des informations exactes aux commissaires de recensement Un religieux catholique français qui est occupé depuis longtemps de cette question et qui collationné divers renseignements estime que la population de Palestine et Galilée est actuellement de un million habitants qui se décomposent ainsi par races :
Bédouins et nomade ................................50 000
Musulmans Druses Métoualis ................800 000
Chrétiens de toutes sectes .....................100 000
Juifs ..................................................... 80 000
Païens (une secte persane Acca)........... 200
Institution professionnelle de l’Alliance israélite universelle à Jérusalem. (Photo Danielle Delmaire, 2012)
Quels que soient les chiffres réels il est sûr que les souvenirs religieux du vieux judaïsme attirent Jérusalem une quantité Israélites de plus en plus considérable On dirait une pompe aspirante attire vers la vieille patrie les Juifs ashkénazim de Europe orientale.
Seulement une fois à Jérusalem ces immigrants sont repris par plusieurs organismes, espèces de pompes foulantes qui les reversent sur Europe, ou les fixent, à leur arrivée dans certaines colonies agricoles récentes de Palestine et de Galilée. On peut dire que dans une certaine mesure, il y a un mouvement antisioniste qui répond au mouvement sioniste. La quantité ainsi détournée de Jérusalem est relativement encore faible. La qualité est supérieure. Ce sont les meilleurs éléments qui servent ces expériences intéressantes.
Je ne veux nullement dire, - ce serait faux, - que le but de Alliance israélite française, qui est le principal agent de cette œuvre, est de refouler les Juifs de Jérusalem sur Europe ou le reste de Orient. Elle veut seulement leur fournir un outil qui leur permettra de sortir de la misère, mais tous ne peuvent trouver emploi de cet outil Jérusalem. La langue des affaires étant en Orient le français, c'est le français on leur enseigne. Il est même seulement de stricte justice de reconnaître que nulle part en Palestine les méthodes enseignement de notre langue ne sont meilleures et les résultats plus satisfaisants que dans les écoles de cette société. L'Alliance israélite française créé des écoles primaires à Jaffa, Haïfa, Safed et Tibériade, - je néglige volontairement les établissements de Syrie.- Le groupe très important fondé Jérusalem, avec des divisions gratuites et des divisions payantes, un internat et un externat, contient plus de 1 000 élèves.
Mais ce est pas tout Alliance israélite française voulu donner ses coreligionnaires de Palestine la faculté de faire autre chose que du commerce Rêvant pour la race une évolution industrielle et agricole elle créé Jérusalem une école professionnelle et Mihvé-Israel dans la plaine de Sarôn une cole agriculture.
L'école professionnelle de Jérusalem est dirigée par M. Antébi Israelite de Damas, qui a fait à l'École des Arts et Métiers de Châlons ses études techniques. Elle m'a paru fort bien comprise et habilement menée. Elle comporte un atelier de charronnage un atelier de mécanique, un autre de menuiserie, un autre pour la taille des pierres, un cours de dessin et de modelage, etc., plus des cours de sciences et un cours supérieur de français. L' enseignement a lieu dans notre langue. Un très petit nombre des 200 élevés formés par l'École se fixe Jérusalem. Ils essaiment sur toute la côte syrienne, à Beyrouth, Haïfa, Jaffa, refluent sur Damas, et vont assez souvent en Grèce, en Egypte, à Constantinople, Andrinople et parfois même en France.
L'École d'agriculture de Mihvé-Israël est située à 4 kilomètres environ de Jaffa, sur la route de Jérusalem, dans l'une des plus riches parties de la plaine de Sarôn. Son directeur est M. Niego, Israélite d'Andrinople qui a suivi les cours et pris le diplôme de l'École agronomique de Montpellier. L'établissement de Mihvé-Israël comptait 200 élèves en 1898. Les cours se font en français. Les élèves qui viennent non seulement de Jérusalem mais de tout le reste de Orient reçoivent quand ils ont fini leurs études, des avances qui doivent être employées à fonder une exploitation agricole. Le cours de viniculture m'a paru bien fait et pratique.
Je ne veux nullement dire, - ce serait faux, - que le but de Alliance israélite française, qui est le principal agent de cette œuvre, est de refouler les Juifs de Jérusalem sur Europe ou le reste de Orient. Elle veut seulement leur fournir un outil qui leur permettra de sortir de la misère, mais tous ne peuvent trouver emploi de cet outil Jérusalem. La langue des affaires étant en Orient le français, c'est le français on leur enseigne. Il est même seulement de stricte justice de reconnaître que nulle part en Palestine les méthodes enseignement de notre langue ne sont meilleures et les résultats plus satisfaisants que dans les écoles de cette société. L'Alliance israélite française créé des écoles primaires à Jaffa, Haïfa, Safed et Tibériade, - je néglige volontairement les établissements de Syrie.- Le groupe très important fondé Jérusalem, avec des divisions gratuites et des divisions payantes, un internat et un externat, contient plus de 1 000 élèves.
Mais ce est pas tout Alliance israélite française voulu donner ses coreligionnaires de Palestine la faculté de faire autre chose que du commerce Rêvant pour la race une évolution industrielle et agricole elle créé Jérusalem une école professionnelle et Mihvé-Israel dans la plaine de Sarôn une cole agriculture.
L'école professionnelle de Jérusalem est dirigée par M. Antébi Israelite de Damas, qui a fait à l'École des Arts et Métiers de Châlons ses études techniques. Elle m'a paru fort bien comprise et habilement menée. Elle comporte un atelier de charronnage un atelier de mécanique, un autre de menuiserie, un autre pour la taille des pierres, un cours de dessin et de modelage, etc., plus des cours de sciences et un cours supérieur de français. L' enseignement a lieu dans notre langue. Un très petit nombre des 200 élevés formés par l'École se fixe Jérusalem. Ils essaiment sur toute la côte syrienne, à Beyrouth, Haïfa, Jaffa, refluent sur Damas, et vont assez souvent en Grèce, en Egypte, à Constantinople, Andrinople et parfois même en France.
L'École d'agriculture de Mihvé-Israël est située à 4 kilomètres environ de Jaffa, sur la route de Jérusalem, dans l'une des plus riches parties de la plaine de Sarôn. Son directeur est M. Niego, Israélite d'Andrinople qui a suivi les cours et pris le diplôme de l'École agronomique de Montpellier. L'établissement de Mihvé-Israël comptait 200 élèves en 1898. Les cours se font en français. Les élèves qui viennent non seulement de Jérusalem mais de tout le reste de Orient reçoivent quand ils ont fini leurs études, des avances qui doivent être employées à fonder une exploitation agricole. Le cours de viniculture m'a paru bien fait et pratique.
En même temps que Alliance Israélite française développait son œuvre d'enseignement, une autre tentative était faite pour fixer les immigrants juifs non pas Jérusalem ou le sol est ingrat mais dans les parties les plus fertiles de la Palestine et les transformer en colons agricoles. Le Jewish Fund Colonisation de Londres Edmond de Rothschild de Paris une société bienfaisante d'Odessa etc. ont créé un certain nombre de colonies sur lesquelles vivent actuellement après les dernières statistiques qui ont été communiquées 4320 Juifs.
En voici l'énumération peu près complète :
En voici l'énumération peu près complète :
Groupe de Palestine
Artouf. — 700 hectares; 50 colons. Israélites, Bulgares Très récente. Fondée par une société d'Odessa.
Kastinia. — 560 hectares; 150 colons. Grande culture. Située tout près de Gaza. Fondée par la société Odessa.
Diran. — 1050 hectares; 300 habitants. Résultats excellents. Vigne. Colons indépendants de Pologne.
Ekran. — 480 hectares; 150 habitants. Arbres fruitiers, oliviers, amandiers. Fondée par M. Edmond de Rothschild
Fchtah ikvah. — 1400 hectares 800 habitants Grande culture blé orge mûriers orangers Fondée par M. Edmond de Rothschild.
Katia. — 300 hectares ; 130 habitants. Vigne et grande culture. Fondée par la société Odessa.
Ouad el Hanin. — 155 hectares; 130 habitants venus de Pologne de leur seule initiative. Résultats médiocres Secourus par le Jewish Fund of Colonisation. Vigne et orangers
Richon-Sion. — 750 hectares; 310 habitants. Créée en 1881 par Edmond de Rothschild Excellente et riche organisation vinicole.
Toutes les colonies ci-dessus envoient leur raisin Richon-Sion qui produit ainsi par des moyens perfectionnés 18000 20000 hectolitres de vin de qualité supérieure Les plants viennent du Bordelais.
Groupe de Galilée
Roch-Pina. — 340 hectares 350 habitants Vigne vin de raisin sec Malaga) Juifs roumains
Yessod Hamala. — 450 hectares 220 habitants Grande culture
Michmar Huyarden. — Récente Fondé parle Jewish Fund of Colonisation. Pas de renseignements sur le nombre des habitants
Metoulet, extrémité de la Palestine. — 13 000 hectares; 130 habitants. Excellent terrain pour grande culture.
Près de Damas Edmond de Rothschild acheté 7 000 hectares dont on n'a encore rien fait. Il eu des difficultés avec le gouvernement ottoman. Les Juifs se plaignent que l'antisémitisme des bureaux du quai Orsay empêche de pousser l'affaire. Aucun des renseignements que j'ai pris ne confirme ces récriminations.
Groupe de Haifa
Zichron Jacob. — Ce est pas une colonie mais un groupe installé sur un rameau dû Carmel avec des caves pour le vin comme à Richon-Sion. 1 600 hectares 1 200 habitants.
Haedera, à une heure de Césarée. — 3 000 hectares; 200 habitants Marécageux et fiévreux 100 décès ont eu lieu dès installation On plante des eucalyptus. Terrain excellent pour la grande culture
Quel été le succès des efforts tentés ? On nié que les Juifs ashkénazim ou séphardim, héréditairement développés dans le sens commercial, déracinés de la terre depuis plus de deux mille ans, pussent redevenir des paysans; et il est bien rare en effet qu'un ouvrier de nos villes françaises, dont presque toujours le grand-père ou arrière-grand-père était pourtant un terrien, soit capable de redevenir cultivateur. Il faut remarquer, de plus, que souvent en Palestine l'expérience s'est faite dans de mauvaises conditions, au moins à un point de vue. A Roch-Pina, il y a mois de 1 hectar par habitant. A Yessod Hamala, colonie de grande culture, 2 hectares par habitant. A Fehtah-Tikvah moins encore etc. Il semblerait qu'on ait créé des ghettos ruraux à la place des ghettos urbains, et c'est une grande faute. Aussi ces colonies, prises dans leur ensemble, ne se suffisent pas encore à elles-mêmes et il ne faut pas s'en étonner.
Ce surpeuplement se comprend d'autant moins que jusqu'à présent, les Juifs paraissent peu enclins aux travaux les plus rudes de la grande culture; mais remarquablement intelligents, ils dirigent fort bien celle-ci en louant des manœuvres arabes ou syriens. Au contraire ils deviennent très facilement bons maraîchers Les gains petits et rapides, les nombreuses récoltes successives qu'on obtient avec les cultures vivrières, les remettent aisément en contact avec la terre et la leur font aimer. Les femmes, les enfants eux-mêmes vont avec plaisir travailler au jardin. Ceci d'ailleurs est un instinct oriental, je dirais presque méridional, puisque l'Espagnol lui-même le possède : l'Arabe de Tunisie et l'Algérie, le Turc lui-même, malgré sa paresse sont aussi des jardiniers excellents.
Ces qualités d'intelligence, de soin, de patience méticuleuse, jointes à leur esprit organisation, ont fait également des colons israélites de Palestine de très bons vignerons. Ils sont assez enclins à laisser faire le gros ouvrage, défonçage et labour après la plantation, par des manœuvres étrangers ; mais la greffe, mais la taille, mais surtout la fabrication du vin leur conviennent admirablement, et il est impossible d'y mieux réussir qu'eux On peut en donner une preuve évidente : alors que le vin des colonies allemandes se vend dans le pays 25 francs l'hectolitre, celui de Richon-Sion atteint couramment et dépasse le prix de 100 francs. C'est une marque cotée Bordeaux et surtout à Hambourg grand, centre de falsification.
En résumé, il semble que les colons israélites de Palestine soient capables de réussir dans l'agriculture industrielle et maraîchère. L'expérience, pour la culture des céréales, à été faite dans d'assez mauvaises conditions. De plus, on n'a peut-être pas assez surveillé le personnel dirigeant.
On sait que les sujets des puissances civilisées résidant en pays ottoman échappent complètement autorité du gouvernement turc et ressortissent leur consul. Il n'en est pas de même pour les Israélites immigrés en Palestine, bien que la presque totalité soit originaire de Roumanie et de Russie. Ils doivent, pour être autorisés à s'établir renoncer leur ancienne nationalité, et se reconnaître sujets ottomans. Mais la situation diplomatique des écoles et des colonies Israélites en est pas moins ambiguë. Tel directeur école est sujet turc ; mais l'école elle-même, propriété de Alliance israélite française sera protégée, au moins officieusement, par le consul de France. Les habitants de telle colonie israélite, d'où qu'ils viennent, ont été forcés de se reconnaître sujets turcs, mais la colonie elle-même fondée, par M.Edmond de Rothschild, qui est Français, sera protégée par le consul de France qui interviendra en sa faveur le cas échéant. Il arrive que les Israélites souffrent de cette ambiguïté de situation. Il arrive aussi ils en sachent profiter
Ce surpeuplement se comprend d'autant moins que jusqu'à présent, les Juifs paraissent peu enclins aux travaux les plus rudes de la grande culture; mais remarquablement intelligents, ils dirigent fort bien celle-ci en louant des manœuvres arabes ou syriens. Au contraire ils deviennent très facilement bons maraîchers Les gains petits et rapides, les nombreuses récoltes successives qu'on obtient avec les cultures vivrières, les remettent aisément en contact avec la terre et la leur font aimer. Les femmes, les enfants eux-mêmes vont avec plaisir travailler au jardin. Ceci d'ailleurs est un instinct oriental, je dirais presque méridional, puisque l'Espagnol lui-même le possède : l'Arabe de Tunisie et l'Algérie, le Turc lui-même, malgré sa paresse sont aussi des jardiniers excellents.
Ces qualités d'intelligence, de soin, de patience méticuleuse, jointes à leur esprit organisation, ont fait également des colons israélites de Palestine de très bons vignerons. Ils sont assez enclins à laisser faire le gros ouvrage, défonçage et labour après la plantation, par des manœuvres étrangers ; mais la greffe, mais la taille, mais surtout la fabrication du vin leur conviennent admirablement, et il est impossible d'y mieux réussir qu'eux On peut en donner une preuve évidente : alors que le vin des colonies allemandes se vend dans le pays 25 francs l'hectolitre, celui de Richon-Sion atteint couramment et dépasse le prix de 100 francs. C'est une marque cotée Bordeaux et surtout à Hambourg grand, centre de falsification.
En résumé, il semble que les colons israélites de Palestine soient capables de réussir dans l'agriculture industrielle et maraîchère. L'expérience, pour la culture des céréales, à été faite dans d'assez mauvaises conditions. De plus, on n'a peut-être pas assez surveillé le personnel dirigeant.
On sait que les sujets des puissances civilisées résidant en pays ottoman échappent complètement autorité du gouvernement turc et ressortissent leur consul. Il n'en est pas de même pour les Israélites immigrés en Palestine, bien que la presque totalité soit originaire de Roumanie et de Russie. Ils doivent, pour être autorisés à s'établir renoncer leur ancienne nationalité, et se reconnaître sujets ottomans. Mais la situation diplomatique des écoles et des colonies Israélites en est pas moins ambiguë. Tel directeur école est sujet turc ; mais l'école elle-même, propriété de Alliance israélite française sera protégée, au moins officieusement, par le consul de France. Les habitants de telle colonie israélite, d'où qu'ils viennent, ont été forcés de se reconnaître sujets turcs, mais la colonie elle-même fondée, par M.Edmond de Rothschild, qui est Français, sera protégée par le consul de France qui interviendra en sa faveur le cas échéant. Il arrive que les Israélites souffrent de cette ambiguïté de situation. Il arrive aussi ils en sachent profiter
Les points établissement des colonies juives on pu s'en apercevoir ne coïncident nullement avec les lieux considérés comme saints par la tradition hébreuse. Ces colonies ont été s'établir près du Carmel ou dans la plaine d'Esdraëlon, dans cette Galilée que les Hébreux virent toujours de mauvais œil, ou surtout dans la plaine de Sâron de Gaza Ekrôn et même au delà de Jaffa, c'est-à-dire en pays philistin et samaritain. C'est que cette plaine constitue la seule région fertile de la Palestine proprement dite. Le plateau de Juda est géologiquement fort semblable à nos Causses cévenols, et il est plus pauvre encore. Une partie des eaux pluviales s'engloutit immédiatement dans les fissures du sol calcaire, fissures extrêmement nombreuses, et qui prennent peut-être une ampleur considérable. Sur un terrain appartenant au groupe scolaire de l'Alliance française israélite, des fouilles récentes (octobre 1898) en ont révélé une qui s'enfonce à plusieurs centaines de mètres au-dessous du niveau du sol. Les eaux perdues se retrouvent quand on se rapproche de la mer quelques mètres seulement au-dessous de la surface ce qui explique la richesse des vergers orangers, l'exubérance de la végétation arborescente partout où l'homme fait des plantations à quelque distance de la mer comme à Jaffa. Mais toutes les eaux ne se perdent pas dans le sol. Encore maintenant, et à une époque géologique où les pluies étaient beaucoup plus abondantes, elles ont raviné les plateaux calcaires de Juda et ont entraîné vers l'W., du côté de la Méditerranée, des alluvions fertiles mêlées au bas des pentes, à de nombreux cailloux non roulés, dont les arêtes restent vives. C' est ainsi que la plaine de Sâron a dû se constituer : la couche de terre meuble y présente souvent une épaisseur de plusieurs mètres, et les noriahs y rencontrent l'eau à des profondeurs médiocres. Aussi est-ce là surtout ont été faites les tentatives de colonisation agricole. On vient de voir celles des Israélites. Les Allemands sont venus installer près d'eux. Mais pour des raisons la fois politiques, religieuses et financières, une partie reflué vers Jérusalem.
L'immigration allemande en Palestine date de 1868. L'origine de ce mouvement est religieuse. A cette époque Christoph Hoffmann, parent d'un philologue distingué du même nom, prêchait déjà en Wurtemberg, depuis un certain temps, une nouvelle réforme du christianisme. Il supprimait ou passait sous silence le dogme de la Trinité, et surtout celui de la justification, qui est la base même du luthéranisme ; il abolissait la communion, engageait les hommes à agir chrétiennement plutôt qu'à prier, parce que les formules de prières sont vides ; et pour lui agir chrétiennement c'était travailler de ses mains, dans la simplicité de la nature, aussi près que possible du temple de Jérusalem, où Jésus allait bientôt apparaître : car le dernier jugement est proche
Telles étaient, au début les doctrines de la secte des Templiers allemands. Elles se sont depuis profondément modifiées. La plupart de ses adeptes paraissent aujourd'hui, sinon nier, du moins se soucier assez peu du moment suprême qu'ils sont venus attendre en Palestine. Les uns ont tourné au pur déisme, les autres se rapprochent insensiblement du luthéranisme; un petit nombre, paraît-il, ne croit plus à la divinité du Christ, au sens où l'entendent à la fois catholiques et luthériens. Mais ce qui a continué à caractériser leurs petits groupements, ce sont de fortes convictions morales, l'obéissance à des règles de conduite tirées de l'Evangile.
Les disciples de Christoph Hoffmann se composèrent surtout, primitivement, de Wurtembergeois des classes inférieures. Il y avait quelques demi-bourgeois et des ouvriers, mais la grande majorité étaient des paysans. Ils ont formé des espèces de noyaux auxquels est venue adhérer ensuite une pulpe Allemands non Templiers.
Le premier point installation fut Haifa près du massif du Carmel, le meilleur port de la côte. Mais il y eut un schisme, qui d'ailleurs ne fit que grossir cette population germaine transplantée en Orient. Laissant à Haïfa 300 de ses fidèles, auxquels étaient venus se joindre 200 autres Allemands qui ne reconnaissaient par son autorité spirituelle, Christoph Hoffmann alla établir en 1869-1870 à Jaffa, sur des terrains abandonnés par une société protestante anglo-américaine, qui avait pas réussi. Puis ce groupe essaimant encore, créa une autre colonie au village de Sârônâ, à 4 kilomètres environ de Jaffa, et Christoph remonta à Jérusalem, où il s'installa définitivement et mourut. Il était chef spirituel et temporel de la secte. Son fils, qui porte le même prénom que lui, n'a hérité de lui que les pouvoirs spirituels. Le temporel est administré par Saudel, architecte.
Actuellement le nombre des Allemands établis en Palestine se décompose ainsi :
L'immigration allemande en Palestine date de 1868. L'origine de ce mouvement est religieuse. A cette époque Christoph Hoffmann, parent d'un philologue distingué du même nom, prêchait déjà en Wurtemberg, depuis un certain temps, une nouvelle réforme du christianisme. Il supprimait ou passait sous silence le dogme de la Trinité, et surtout celui de la justification, qui est la base même du luthéranisme ; il abolissait la communion, engageait les hommes à agir chrétiennement plutôt qu'à prier, parce que les formules de prières sont vides ; et pour lui agir chrétiennement c'était travailler de ses mains, dans la simplicité de la nature, aussi près que possible du temple de Jérusalem, où Jésus allait bientôt apparaître : car le dernier jugement est proche
Telles étaient, au début les doctrines de la secte des Templiers allemands. Elles se sont depuis profondément modifiées. La plupart de ses adeptes paraissent aujourd'hui, sinon nier, du moins se soucier assez peu du moment suprême qu'ils sont venus attendre en Palestine. Les uns ont tourné au pur déisme, les autres se rapprochent insensiblement du luthéranisme; un petit nombre, paraît-il, ne croit plus à la divinité du Christ, au sens où l'entendent à la fois catholiques et luthériens. Mais ce qui a continué à caractériser leurs petits groupements, ce sont de fortes convictions morales, l'obéissance à des règles de conduite tirées de l'Evangile.
Les disciples de Christoph Hoffmann se composèrent surtout, primitivement, de Wurtembergeois des classes inférieures. Il y avait quelques demi-bourgeois et des ouvriers, mais la grande majorité étaient des paysans. Ils ont formé des espèces de noyaux auxquels est venue adhérer ensuite une pulpe Allemands non Templiers.
Le premier point installation fut Haifa près du massif du Carmel, le meilleur port de la côte. Mais il y eut un schisme, qui d'ailleurs ne fit que grossir cette population germaine transplantée en Orient. Laissant à Haïfa 300 de ses fidèles, auxquels étaient venus se joindre 200 autres Allemands qui ne reconnaissaient par son autorité spirituelle, Christoph Hoffmann alla établir en 1869-1870 à Jaffa, sur des terrains abandonnés par une société protestante anglo-américaine, qui avait pas réussi. Puis ce groupe essaimant encore, créa une autre colonie au village de Sârônâ, à 4 kilomètres environ de Jaffa, et Christoph remonta à Jérusalem, où il s'installa définitivement et mourut. Il était chef spirituel et temporel de la secte. Son fils, qui porte le même prénom que lui, n'a hérité de lui que les pouvoirs spirituels. Le temporel est administré par Saudel, architecte.
Actuellement le nombre des Allemands établis en Palestine se décompose ainsi :
Jerusalem ............. 300 templiers
200 non templiers
Haïfa ...................... 300 templiers
200 non templiers
Jaffa ....................... 250 templiers
Sârônâ.................. 250 templiers
______
TOTAL.................1 500
Les deux colonies de Jaffa et de Sârônâ ont un chef spirituel et temporel indépendant, qui est M. Klink.
Les Templiers ont à Jérusalem une école élémentaire qui ne compte que 25 élèves, et une école supérieure où on enseigne le français, l'anglais, l'allemand et l'arabe et qui n'a que 5 élèves. On y a renoncé à l'enseignement du latin et du grec. A Haïfa il y a une école avec 70 élèves; à Jaffa, une école avec 50 élèves et à Sârônâ deux écoles
Les rapports des Templiers allemands avec la mère patrie sont assez remarquables. Lors de leur exode, Christoph Hoffmann avait fait renoncer ses disciples la nationalité allemande. Ils devaient vivre sans lois, selon l'évangile, l'équité et leur conscience. Encore aujourd'hui, jamais leur consul n'a à intervenir dans les différends que les membres de la secte peuvent avoir entre eux ; ces différends sont toujours réglés dans la colonie même, à l'amiable ; ceci est au tant plus remarquable que Christoph Hoffmann avait nullement aboli la propriété individuelle. Il avait seulement recommandé de vivre d'une façon modeste en travaillant de ses mains. Ses fidèles sont des laboureurs et des vignerons, ou bien des artisans : charrons, serruriers, boulangers. Avant la construction du chemin de fer, ils avaient organisé des entreprises de transports sur Jérusalem. La faillite d'une banque allemande, il quelques années, compromit leur prospérité : ils ont traversé courageusement cette crise et l'ont presque oubliée.
Mais s'ils peuvent se passer de juges entre eux, parce ils sont de braves gens, il leur arrive fatalement d'avoir des contestations avec des étrangers qui sont moins honnêtes qu'eux. Et c'est ainsi que leur consul a dû intervenir et que l'Allemagne a tout doucement remis la main, avec beaucoup adresse, sur ces nationaux qui, tout d'abord ne paraissaient pas se soucier d'elle. Actuellement la réconciliation est faite. Quand la colonie de Sârônâ a fondé deux sociétés coopératives pour la vente et la fabrication du vin, elle s'est conformée à la loi allemande de 1888. Le gouvernement impérial de Berlin, d'ailleurs, a fait tous ses efforts pour rallier ces indépendants. Il la remplacé le simple agent consulaire de Jaffa par un consul de carrière. Il a exempté les Templiers du service militaire en temps de paix, et il les en dispense même en temps de guerre, " à condition qu'ils puissent prouver qu'ils ont, à l'étranger un établissement assuré ou les moyens de vivre. " Or, tous se trouvent dans cette situation. Moralement et matériellement ils sont parvenus, de l'aveu de tout le monde, à un niveau très supérieur à celui où sont restés leurs compatriotes Wurtembergeois de la même classe sociale. C'est là un cas rare et intéressant du succès d'une entreprise de petite colonisation agricole. Il n'est pas niable que ce succès ait pour cause principale la moralité supérieure des membres de ces groupements, moralité fondée sur des convictions religieuses particularistes et un peu exaltées. Ce sont, si je puis dire, des couvents de gens mariés, des espèces de moines qui se reproduisent.
Ces centres allemands constituent incontestablement une forte base d'influence pour le gouvernement de Berlin. Il a le droit de dire qu'il a maintenant en Palestine des intérêts nationaux à défendre, et l'on prête à l'Empereur d'Allemagne, qui a publiquement, à Jaffa, " félicité les colons allemands de leurs efforts " et promis " que ces efforts n'auraient pas été faits en vain ", l'intention d'obtenir du Sultan d'importantes concessions de terres, où viendraient se fixer de nouveaux essaims.
De plus cette population germanique connaissant parfaitement le pays, fournit de précieuses recrues aux commis voyageurs allemands, qui ont grandi si considérablement la part des échanges de leur pays avec la Palestine.
Il est vrai autre part que influence politique de ces colons sur les populations syriennes est nulle, et que leur action ne se peut comparer, cet égard, avec celle de nos communautés catholiques françaises ou même celle des œuvres orthodoxes russes, mais ils ont introduit en Palestine un élément qui n'y existait pas, et qui dans une mesure encore faible, mais cependant intéressante, modifie l'aspect de la Terre Sainte et la laïcise. Peut-être la France pourrait- elle, pour faire équilibre à cet élément agricole allemand, manifester une attention plus vive pour les colonies et les écoles professionnelles des œuvres et des personnages israélites qui se réclament de la France. Mais cela ne lui donnerait que des semi-protégés, d'origine roumaine et polonaise, que des Juifs français s'efforcent avec un dévouement digne d'éloges, de tirer de abjection et de la misère. L'Allemagne, en Palestine, commence, au contraire, à posséder des nationaux qui vivent de leur industrie et non d'aumônes.
200 non templiers
Haïfa ...................... 300 templiers
200 non templiers
Jaffa ....................... 250 templiers
Sârônâ.................. 250 templiers
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TOTAL.................1 500
Les deux colonies de Jaffa et de Sârônâ ont un chef spirituel et temporel indépendant, qui est M. Klink.
Les Templiers ont à Jérusalem une école élémentaire qui ne compte que 25 élèves, et une école supérieure où on enseigne le français, l'anglais, l'allemand et l'arabe et qui n'a que 5 élèves. On y a renoncé à l'enseignement du latin et du grec. A Haïfa il y a une école avec 70 élèves; à Jaffa, une école avec 50 élèves et à Sârônâ deux écoles
Les rapports des Templiers allemands avec la mère patrie sont assez remarquables. Lors de leur exode, Christoph Hoffmann avait fait renoncer ses disciples la nationalité allemande. Ils devaient vivre sans lois, selon l'évangile, l'équité et leur conscience. Encore aujourd'hui, jamais leur consul n'a à intervenir dans les différends que les membres de la secte peuvent avoir entre eux ; ces différends sont toujours réglés dans la colonie même, à l'amiable ; ceci est au tant plus remarquable que Christoph Hoffmann avait nullement aboli la propriété individuelle. Il avait seulement recommandé de vivre d'une façon modeste en travaillant de ses mains. Ses fidèles sont des laboureurs et des vignerons, ou bien des artisans : charrons, serruriers, boulangers. Avant la construction du chemin de fer, ils avaient organisé des entreprises de transports sur Jérusalem. La faillite d'une banque allemande, il quelques années, compromit leur prospérité : ils ont traversé courageusement cette crise et l'ont presque oubliée.
Mais s'ils peuvent se passer de juges entre eux, parce ils sont de braves gens, il leur arrive fatalement d'avoir des contestations avec des étrangers qui sont moins honnêtes qu'eux. Et c'est ainsi que leur consul a dû intervenir et que l'Allemagne a tout doucement remis la main, avec beaucoup adresse, sur ces nationaux qui, tout d'abord ne paraissaient pas se soucier d'elle. Actuellement la réconciliation est faite. Quand la colonie de Sârônâ a fondé deux sociétés coopératives pour la vente et la fabrication du vin, elle s'est conformée à la loi allemande de 1888. Le gouvernement impérial de Berlin, d'ailleurs, a fait tous ses efforts pour rallier ces indépendants. Il la remplacé le simple agent consulaire de Jaffa par un consul de carrière. Il a exempté les Templiers du service militaire en temps de paix, et il les en dispense même en temps de guerre, " à condition qu'ils puissent prouver qu'ils ont, à l'étranger un établissement assuré ou les moyens de vivre. " Or, tous se trouvent dans cette situation. Moralement et matériellement ils sont parvenus, de l'aveu de tout le monde, à un niveau très supérieur à celui où sont restés leurs compatriotes Wurtembergeois de la même classe sociale. C'est là un cas rare et intéressant du succès d'une entreprise de petite colonisation agricole. Il n'est pas niable que ce succès ait pour cause principale la moralité supérieure des membres de ces groupements, moralité fondée sur des convictions religieuses particularistes et un peu exaltées. Ce sont, si je puis dire, des couvents de gens mariés, des espèces de moines qui se reproduisent.
Ces centres allemands constituent incontestablement une forte base d'influence pour le gouvernement de Berlin. Il a le droit de dire qu'il a maintenant en Palestine des intérêts nationaux à défendre, et l'on prête à l'Empereur d'Allemagne, qui a publiquement, à Jaffa, " félicité les colons allemands de leurs efforts " et promis " que ces efforts n'auraient pas été faits en vain ", l'intention d'obtenir du Sultan d'importantes concessions de terres, où viendraient se fixer de nouveaux essaims.
De plus cette population germanique connaissant parfaitement le pays, fournit de précieuses recrues aux commis voyageurs allemands, qui ont grandi si considérablement la part des échanges de leur pays avec la Palestine.
Il est vrai autre part que influence politique de ces colons sur les populations syriennes est nulle, et que leur action ne se peut comparer, cet égard, avec celle de nos communautés catholiques françaises ou même celle des œuvres orthodoxes russes, mais ils ont introduit en Palestine un élément qui n'y existait pas, et qui dans une mesure encore faible, mais cependant intéressante, modifie l'aspect de la Terre Sainte et la laïcise. Peut-être la France pourrait- elle, pour faire équilibre à cet élément agricole allemand, manifester une attention plus vive pour les colonies et les écoles professionnelles des œuvres et des personnages israélites qui se réclament de la France. Mais cela ne lui donnerait que des semi-protégés, d'origine roumaine et polonaise, que des Juifs français s'efforcent avec un dévouement digne d'éloges, de tirer de abjection et de la misère. L'Allemagne, en Palestine, commence, au contraire, à posséder des nationaux qui vivent de leur industrie et non d'aumônes.

































