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Samedi 2 Avril 2016

Imams en France, loin des clichés

Principale incarnation de l’autorité islamique en France, les imams suscitent l’intérêt des pouvoirs publics, qui leur prêtent une grande influence. Il faudrait donc les surveiller, les encadrer, voire les former, pour éviter toute dérive communautaire. Cette lecture se heurte à la réalité du travail des religieux musulmans, dont le profil est avant tout déterminé par les fidèles qui fréquentent le lieu de culte.



Nabil El Makhloufi. – « La Foule IV » (détail), 2012 Galerie d’art L’atelier 21, Casablanca
Nabil El Makhloufi. – « La Foule IV » (détail), 2012 Galerie d’art L’atelier 21, Casablanca

Le MONDE diplomatique, Avril 2016, pages 1, 22 et 23, en kiosques

Par Solenne Jouanneau,
Maître de conférences en Science Politique (Institut d’Etudes Politiques de Strasbourg)

Principale incarnation de l’autorité islamique en France, les imams suscitent l’intérêt des pouvoirs publics, qui leur prêtent une grande influence. Il faudrait donc les surveiller, les encadrer, voire les former, pour éviter toute dérive communautaire. Cette lecture se heurte à la réalité du travail des religieux musulmans, dont le profil est avant tout déterminé par les fidèles qui fréquentent le lieu de culte.

Après les attaques qui ont frappé la France le 13 novembre 2015, M. Alain Juppé (Les Républicains) a réclamé « l’expulsion des imams étrangers qui se rendent coupables d’apologie du terrorisme » (Le Figaro, 17 novembre 2015). Quelques semaines plus tard, à l’occasion de l’anniversaire de la tuerie de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher, le premier ministre Manuel Valls dénonçait « les imams qui répandent la haine de l’autre et de la République » (L’Obs, 8 janvier 2016). Les médias fonctionnent souvent comme une caisse de résonance de ces discours. La moitié des 831 articles titrant sur les imams entre 1995 et 2008 étaient ainsi consacrés à des individus « expulsés » ou « en voie d’expulsion ». Les autres mettaient en scène des imams pas (ou mal) formés, dépendant de l’étranger ou insuffisamment intégrés. La figure de l’imam « éclairé », prêchant un « islam à la française », est parfois évoquée, mais à condition qu’elle apparaisse comme l’exception qui confirme la règle.

Ce traitement médiatique et politique focalise l’attention sur des situations exceptionnelles et souvent effrayantes. Difficile, dès lors, de convaincre du caractère pourtant tout à fait ordinaire de l’écrasante majorité des hommes qui guident les rituels islamiques dans les 2 500 lieux de culte musulmans de France. Selon les données du ministère de l’intérieur, seuls 31 imams ont été expulsés entre 2001 et 2011, alors que 80 % d’entre eux sont étrangers, donc potentiellement expulsables. Très minoritaires, les réactionnaires et les radicaux n’épuisent pas à eux seuls la réalité de l’imamat en France. Appréhender ce magistère à l’aune de ses représentants extrémistes paraît aussi réducteur que d’identifier tous les prêtres catholiques à la pédophilie, à l’homophobie et au royalisme au motif que certains ont effectivement agressé des enfants, tenu des propos homophobes, etc.

Cela est d’autant plus vrai que les imams de France, davantage encore que les prêtres, se caractérisent par leur grande hétérogénéité.

L’islam (...)

Retrouvez cet extrait sur le site du MONDE diplomatique.




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