Vendredi 26 Décembre 2014

[Revue 21] L'oiseau de Palestine: Enquête sur Khaled Jarrar


Ancien garde du corps de Yasser Arafat, il a choisi de passer de l’autre côté du « mur » pour défendre l’idée d’un État palestinien. Dans son atelier proche de Ramallah, il use de l’art comme d’une arme. Pour briser la cage.




L'OISEAU DE PALESTINE : ENQUÊTE SUR KHALED JARRAR

PAR JEAN-PIERRE FILIU
ILLUSTRÉ PAR : MARTA ORZEL

Ancien garde du corps de Yasser Arafat, il a choisi de passer de l’autre côté du « mur » pour défendre l’idée d’un État palestinien. Dans son atelier proche de Ramallah, il use de l’art comme d’une arme. Pour briser la cage.

UN EXTRAIT DU RÉCIT

C’est un bel oiseau noir aux ailes bleues qui butine des fleurs de jasmin. Vous ne connaissez sans doute son nom ni en français, souimanga de Palestine, ni en anglais, Palestine sunbird. Mais cette boule de plumes de moins de dix grammes est devenue le symbole de l’État de Palestine.

T-shirt rose, jean délavé et carrure d’athlète décontracté, Khaled Jarrar campe en cette fin mai devant son sceau de l’État de Palestine, exposé à l’école des Beaux-Arts de Paris. Des centaines de visiteurs se pressent devant les œuvres les plus provocantes, coupes de champagne à la main. Lui est un peu fatigué, décalé. Arrivé de Ramallah, en Palestine, il a dû traverser le pont Allenby, sur le Jourdain, et se rendre à Amman, avant de pouvoir rallier la France. L’aéroport de Tel-Aviv tout proche de sa résidence lui est interdit par Israël. Ainsi va la vie en Palestine « autonome ».

L’aventure du « souimanga de Palestine » a débuté il y a trois ans. Khaled Jarrar a 38 ans, et déjà vécu plusieurs vies. Coincé dans le réduit de Cisjordanie, un territoire en marge, obsédé par la question du contrôle des populations, il imagine un faux tampon « État de Palestine » à l’emblème de ce passereau noir aux ailes bleues que l’on ne trouve que sur sa terre orpheline, le souimanga de Palestine.

Dans son atelier proche de Ramallah, l’artiste fabrique pour « vingt dollars » un tampon orné de l’oiseau symbole : « Des Israéliens ont essayé de faire de mon passereau “le souimanga d’Israël”, mais son lien avec la Palestine est certifié par la communauté scientifique internationale. Ils ne peuvent s’approprier cet oiseau, comme ils l’ont fait avec notre falafel. »

Au printemps 2011, alors que le monde arabe vibre au rythme des « printemps », Khaled Jarrar décide de donner vie à sa création. À la gare routière de Ramallah, la capitale administrative de l’Autorité nationale palestinienne que l’on atteint après avoir franchi de nombreux checkpoints, il propose aux visiteurs étrangers de tamponner leur passeport. Conscient des limites de sa démarche, il prévient ses interlocuteurs qu’ils devront « assumer seuls » les conséquences de leur prise de position.

Retrouvez la suite de cet extrait sur le site de Revue 21.




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