Samedi 7 Octobre 2017

Leurs passions tristes, nos causes communes (Mediapart)


Vous qui lisez Mediapart, prenez garde : sous l’apparence d’un journal d’investigation indépendant et participatif, vous êtes en train de soutenir l’agent d’influence du terrorisme islamiste en France. Ce n’est pas une blague, c’est sérieux puisque Le Figaro Magazine l’affirme, et il n’est pas le seul.





Mediapart
6 octobre 2017


Par Edwy Plenel

Ils ne lâchent pas l’affaire. « Ils » ? Tous ceux qui ne veulent pas que le monde soit meilleur, plus juste, plus libre, plus égalitaire, plus fraternel. Ils sont conservateurs par refus de se mettre en cause, réactionnaires par peur de l’inédit et de l’incertain, égarés par haines d’eux-mêmes, de ce qu’ils furent et qu’ils ne sont plus – jeunes, audacieux, révoltés, indignés. Ils sont aussi violents et haineux par crainte de perdre leurs pauvres privilèges qu’ils savent fragiles tant l’imposture, la facilité, sinon la fainéantise, sans compter l’aveuglement de l’entre soi en ont sapé les fondations, déjà minées par l’exploitation du travail et l’indifférence au sort du plus grand nombre.

Aussi, par temps de casse du code du travail (lire ici), de mise en cause de l’État de droit (lire là), de chasse aux migrants et de criminalisation de la solidarité (lire ici et là), leur faut-il faire diversion. Dès lors, rien ne leur importe plus que de remiser au second plan les questions sociales et démocratiques. Contre l’agenda porté par la société, ses meilleures volontés, ses indignations généreuses et ses mobilisations solidaires, leur mission est de remettre en scène le bouc émissaire du moment, cette tête de turc qui permettra de réinstaller au cœur du débat public des hiérarchies supposées naturelles (d’origine, de milieu, de culture, de croyance, d’apparence ou d’appartenance) et de justifier les injustices qu’elles légitiment.

Comme s’ils s’étaient donné le mot, trois hebdomadaires ont ainsi, cette semaine, tiré ensemble contre le péril musulman – car il suffit de bien les lire pour comprendre que les mots « islamisme » et « terrorisme » ne servent ici que d’alibis pour stigmatiser une partie de notre peuple à raison de son histoire, de sa culture ou de sa religion. Ce que d’ailleurs assume explicitement la couverture du Figaro Magazine qui cible « les agents d’influence de l’islam ». Faisant concert commun, Marianne, Valeurs actuelles et Le Fig-Mag ont donc eu à cœur de nous rappeler aux véritables urgences, la semaine où a été votée la loi la plus liberticide de la Cinquième République (lire ici), où le président de la République s’en est pris à ceux qui « foutent le bordel » (lire là) et où l’on pouvait découvrir, sur Mediapart notamment, bien d’autres urgences plus essentielles (par exemple la solidarité avec les migrants, l’instrumentalisation de la CPI par les puissances occidentales, le scandale de corruption à Airbus).

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