Dimanche 19 Mai 2019

L’actualité de la religion. Introduction critique aux sciences sociales des religions





L’actualité de la religion. Introduction critique aux sciences sociales des religions, Camille Tarot, Éditions Le bord de l’eau, mai 2019, 572 p.

« Lorsque Camille Tarot annonce son souci d’apporter sa propre réponse – en référence à une proposition du journal Le Monde adressée à différents experts – aux « questions de Monsieur tout le Monde » sur la religion dans le monde d’aujourd’hui, il ne joue ni la facilité vulgarisatrice, ni la condescendance savante. Il n’offre pas à son lecteur une de ces approches en circuit court, propre à rejoindre d’emblée les inquiétudes du moment. Il entreprend de le guider au long d’un itinéraire réflexif exigeant… en commençant par interroger les mots qui servent à penser la religion » (Danièle Hervieu-Léger, Préface).
 

Le présent ouvrage réunit une introduction aux sciences sociales des religions --destinée au grand public, qui en général les ignore -- à un essai critique afin de les mettre à jour face à une actualité qui les interpelle fortement et continuera de le faire. En effet, l’actualité de la globalisation impose le spectacle déroutant d’un monde des religions pris entre les deux extrêmes de formes si exclusivistes qu’elles justifient la violence, même terroriste, et de formes si iréniques qu’elles recherchent une spiritualité apte à dépasser toutes les frontières, même de confession religieuse.
La question critique se pose donc : l’outillage et les problématiques dont disposent nos disciplines pour penser les faits religieux sont-ils à la hauteur de la situation ?
La place faite à l’islam dans ce parcours s’explique, entre autres, parce qu’à l’occasion des conflits du salafisme djihadiste et de certaines branches du soufisme, il illustre cette contradiction de manière particulièrement forte, mais nullement exclusive.
Au final, l’analyse des phénomènes de radicalisation confirme la victoire définitive de la sociologie wébérienne des conflits de valeurs sur leur réduction marxiste au matérialisme économique de l’intérêt. Les valeurs et leurs conflits, en effet, appartiennent à l’infrastructure des sociétés humaines, parce que c’est sur leur base que se construisent les identités et les mémoires collectives et leurs frontières souvent sanglantes. Aussi, plus un conflit est religieux, plus il mobilise les valeurs. À l’inverse, plus un conflit met en cause les valeurs, plus il tend à se colorer de religion ou du moins d’appels au sacré, fût-il républicain ou laïque.
Ce qui introduit la dialectique des valeurs et des contre-valeurs, que les sociétés pluralistes reconnaissent mais inégalement, alors que toutes les sociétés majorent, pour se protéger, celle des valeurs et des antivaleurs. Pour tenter d’expliquer la complexité rarement reconnue de ces dialectiques et de leur fonctionnement, on avance sous deux néologismes, l’idéal-type de l’« archéoreligion » et la « pharmac/kologie », une notion neuve pour une très vieille chose, qui concerne aussi la physiologie des émotions collectives.
 
Camille Tarot, professeur émérite de sociologie des religions de l’Université de Caen est l’auteur de De Durkheim à Mauss, l’invention du symbolique (La Découverte-MAUSS, 1999), Sociologie et anthropologie de Marcel Mauss (La Découverte, 2003) et Le symbolique et le sacré. Théories de la religion (La Découverte-MAUSS, 2008), prix Crouzet de l’Institut de France, Académie des sciences morales et politiques 2008.
 
 
 



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