Les cahiers de l'Islam
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Lundi 31 Octobre 2016

Les dix penseurs africains qui veulent achever l’émancipation du continent (Le Monde Afrique)

Portraits des intellectuels les plus féconds dans le renouveau d’une pensée africaine « décolonisée ».



Crédit Photo : DR
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C’est sur l’impulsion de Felwine Sarr et Achille Mbembe que s’ouvre, à Dakar et à Saint-Louis, ce vendredi 28 octobre, la première édition des Ateliers de la pensée.

Un rendez-vous appelé à faire date et auquel l’écrivain sénégalais et l’historien camerounais ont convié plusieurs personnalités africaines à élaborer le renouveau d’une pensée africaine plurielle et dégagée, entre autres, du post-colonialisme. Une entreprise de « décolonisation mentale ». Portraits.

Kwame Anthony Appiah

Le Ghanéen Kwame Anthony Appiah, crédit photo : Flickr/CC by 2.0
Le Ghanéen Kwame Anthony Appiah, crédit photo : Flickr/CC by 2.0

Son œuvre pourrait sembler peu africaine et pourtant, c’est l’une des plus importantes et des plus significatives du renouveau de la pensée critique du continent. Résolument inscrite dans les traditions philosophiques occidentales, la réflexion de Kwame Anthony Appiah puise néanmoins sa source dans son histoire familiale et son double héritage culturel, ghanéen et britannique évoqués dès 1992 dans In My Father’s House (Oxford University Press).

Le cosmopolitisme n’est pas seulement une question théorique, c’est une éthique et une pratique pour celui qui a grandi au Ghana avant de mener ses études supérieures en Angleterre et de s’installer aux Etats-Unis, où il a enseigné dans les plus prestigieuses universités. Ainsi qu’il le raconte dans Vers un nouveau cosmopolitisme (éd. Odile Jacob, 2008), Appiah s’est toujours efforcé d’obéir au vade-mecum de son père : « Souvenez-vous que vous êtes des citoyens du monde, et travaillez à le quitter meilleur que vous ne l’aurez trouvé. »


Etre citoyen du monde, c’est s’autoriser à être d’ici et d’ailleurs pleinement, à hériter de l’humanité entière et contribuer à l’enrichir de là où nous sommes. C’est concilier le singulier et l’universel, le différent et l’en-commun, c’est refuser les assignations identitaires. « Les identités ethnoraciales risquent fort de devenir obsessionnelles, un tout et la fin de tout, dans les vies de ceux qui s’identifient à elles. […] Et en oblitérant les identités qu’ils partagent avec les gens en dehors de leur race ou de leur ethnicité, elles les détournent de la possibilité de s’identifier aux Autres. […] Il ne faut pas laisser nos identités raciales nous soumettre à de nouvelles tyrannies », écrit-il dans Color Conscious (Princeton University Press, 1996) avant de nous inviter à vivre « des identités fracturées ».
Ainsi que le remarque dans la revue De(s) générations Anthony Mangeon, professeur de littératures francophones à l’Université de Strasbourg, avec Appiah, né en 1954, comme avec V. Y. Mudimbe, « la pratique africaine de la philosophie, telle qu’ils l’ont conjointement menée en combinant l’étude historique, l’analyse conceptuelle et l’approche anthropologique, peut non seulement fournir un modèle interdisciplinaire, mais surtout illuminer des questions centrales pour la philosophie occidentale ».

Ali Benmakhlouf

Ali Benmakhlouf. Crédit photo : Philippe GROLLIER/PASCO
Ali Benmakhlouf. Crédit photo : Philippe GROLLIER/PASCO

Dans son dernier essai La Conversation comme manière de vivre (éd. Albin Michel), Ali Benmakhlouf s’appuie aussi bien sur Montaigne, Lewis Carroll, Flaubert, Jack Goody, ou James Agee que sur Al-Tawhidi ou Al-Farabi, Barthes ou Leibniz. Il nous démontre une fois de plus que la bibliothèque du monde est ouverte à tous. Grâce à ces références multiples, il étudie sous de nombreux angles tout ce qui fait la richesse de la conversation, là où se joue le lien à soi-même et à autrui et où se noue la relation qui « nous fait tenir l’un à l’autre par la parole ».

Lieu de l’échange, de la confrontation comme de la réconciliation, la conversation est aussi un espace de transmission d’un patrimoine, ainsi que l’a montré la « controverse de Bagdad » lors de laquelle les penseurs musulmans questionnèrent le legs grec et interrogé le lien entre philosophie et islam à l’époque médiévale. Une question fréquente dans la réflexion du philosophe né à Fès en 1959, dont une grand-mère maternelle était sénégalaise. Il enseigne à l’université de Paris-Est-Créteil et se dit « 100 % africain et 100 % européen ». Un pied en France, l’autre au Maroc, Ali Benmakhlouf s’intéresse aussi bien aux questions d’identité, de droit, d’art, d’éthique médicale, de politique que de logique. Il est l’auteur notamment de Pourquoi lire les philosophes arabes (éd. Albin Michel, 2015), un essai remarqué qui nous rappelle à quel point la pensée médiévale arabe, et donc l’islam, a façonné le paysage intellectuel européen.

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