Les cahiers de l'Islam
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Samedi 28 Février 2015

Halal, par-delà les fantasmes de la laïcité

Lotfi Bel Hadj, Essayiste, économiste de formation et entrepreneur



"La question de la laïcité ne veut pas dire que tout le monde doit manger la même chose, mais qu'il faut respecter les orientations des uns et des autres." C'est ainsi que Roland Ries, maire de Strasbourg, conçoit ce qui est propre à la laïcité sur la question des pratiques alimentaires. Après les événements tragiques du 7 au 9 janvier et les polémiques surmédiatisées sur l'islam, il est essentiel de faire un point sur cette prescription religieuse devenue un vrai phénomène de société et passée, en quelques années, de simple niche marketing à la caverne d'Ali Baba: le halal. Le principe de la laïcité, avant de devenir cet outil politique alimentant de nombreuses polémiques, est un concept et une base juridique fondamentale dans notre République, qui implique l'impartialité et la neutralité de l'État à l'égard des confessions religieuses. Je persiste à dire que le halal, comme le casher, est compatible avec la laïcité. C'est une réalité que je m'attache à défendre en tant que républicain convaincu. L'idée est simple: il est possible de pratiquer sa religion sans nier ou biaiser son identité française et -plus important, même si cela m'attriste de constater que nous avons besoin de le mentionner- sans être en infraction avec les lois de notre pays.
Le halal, avant d'être "problématisé", voire même compris dans la perspective d'un enjeu sociétal, est sur le banc des accusés. Le sujet n'est pas maîtrisé. Preuve en est lors d'auditions sur le sujet au Sénat, où les élus confondent halal et casher et posent des questions qui attestent de leur méconnaissance totale du sujet. Mais peu importe, il demeure un instrument politique parfait. Connoté, sorti de son contexte, il suffit de l'agiter pour faire remonter les plus bas instincts et ainsi en jouer et faire valoir des intérêts qui dépassent ceux du simple citoyen.
Et pourtant, légitimer le halal, c'est en faire un allié de la laïcité. Sauf pour celles et ceux qui tentent d'emmener notre pays vers "une laïcité négative" au lieu de tendre vers "une laïcité d'intelligence" que Régis Debray appelle de ses vœux. Jean Baubérot, spécialiste de la sociologie des religions et fondateur de la sociologie de la laïcité, affirme qu'avec sa loi sur le port du voile, la France est "à la limite de ce qui est possible dans une société démocratique". Légiférer sur le droit de manger ou non halal serait un dépassement de cette limite. "La laïcité, c'est, certes, la neutralité, mais c'est aussi la liberté", ajoute Thierry Rambaud, professeur agrégé de droit public à l'Université de Strasbourg et à Sciences Po Paris.
Accepter et légitimer le halal, aussi bien dans le discours que dans les actes, permettrait de sortir l'islam "des caves" pour qu'il se nourrisse et se pratique au grand jour, c'est-à-dire de manière transparente et sous un contrôle direct de la société civile (et non de celui du ministère de l'Intérieur, alimentant des craintes et remettant en question le pacte de confiance entre les Français de toute origine). Bâtir des lieux de culte appropriés, c'est donner un espace identifiable et identifié comme celui qui éduque les fidèles au grand jour. Contre l'islamisme radical, il faut une société qui puisse observer, juger, même s'indigner, mais dans le respect des règles démocratiques. Une mosquée financée avec les deniers du secteur d'activité lié au halal, c'est une mosquée dont le financement est tracé par l'Etat, et dont toutes les activités se pratiqueraient sans fantasmes quant à son opacité présumée. Lire la suite ...

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