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Mercredi 28 Juin 2017

Ce que penser l’intersectionnalité dans les recherches en éducation veut dire (Contretemps)


"Nous publions le texte introductif des journées d’étude « Penser l’intersectionnalité dans les recherches en éducation : Enquêtes, Terrains, Théories », qui se sont déroulées les 18 et 19 mai 2017 à l’École Supérieure du Professorat et de l’Éducation de Créteil. Cette manifestation scientifique a fait l’objet d’attaques réactionnaires[1]. En publiant leur discours introductif, les organisatrices[2] reviennent ici sur les origines et les enjeux de ce colloque". Contretemps.





Contretemps, le 27 juin 2017

Ce que penser l’intersectionnalité dans les recherches en éducation veut dire
Lila Belkacem, Amandine Chapuis et Fanny Gallot 

Nous publions le texte introductif des journées d’étude « Penser l’intersectionnalité dans les recherches en éducation : Enquêtes, Terrains, Théories », qui se sont déroulées les 18 et 19 mai 2017 à l’École Supérieure du Professorat et de l’Éducation de Créteil. Cette manifestation scientifique a fait l’objet d’attaques réactionnaires[1]. En publiant leur discours introductif, les organisatrices[2] reviennent ici sur les origines et les enjeux de ce colloque.


Bonjour à tou.te.s, et merci de votre présence pour ouvrir ces deux journées d’étude.

Nous avons intitulé cette introduction « Ce que parler d’intersectionnalité à l’ESPE veut dire : enjeux scientifiques et politiques des Journées d’études ». En effet, à notre sens, penser, aujourd’hui, depuis Créteil, l’intersectionnalité dans les recherches en éducation, constitue un enjeu scientifique dont le caractère crucial ne trouve d’équivalent que dans l’importance des attentes sociales qui caractérisent notre école. Nous allons donc revenir à présent sur la genèse de ces Journées.

Formateur.trice.s à l’ESPE de Créteil, c’est de notre pratique de travail quotidienne, des échanges avec les collègues, des interactions en formation, des visites dans les écoles, qu’a émergé petit à petit notre envie de mieux appréhender la manière dont les rapports de pouvoir et les discriminations sont produits, reproduits et parfois subvertis dans le cadre de l’école, en mobilisant les outils du travail compréhensif et de la pensée critique, que nos expériences de chercheur.se.s en sciences sociales nous offraient.

Nous nous sommes trouvé.e.s de plus en plus nombreux.ses à penser que la période que nous vivons actuellement, en France, dans le champ éducatif, met en évidence un ensemble de questionnements, de difficultés et de conflits. Ceux-ci ont éveillé chez beaucoup ici à l’ESPE, un profond désir d’analyser, de comprendre, mais aussi de résister à certaines dynamiques de stigmatisation articulant la manière dont nous percevons nos futurs collègues enseignant.e.s et les enfants du point de vue de leurs appartenances sociales, raciales et de sexe.

Les périodes qui ont suivi les attentats de janvier 2015, puis les attaques de novembre 2015, ont été propices à des échanges profonds, intimes, délicats et toujours très féconds avec nos étudiant.e.s, futurs collègues enseignant.e.s. Dans cette académie, nombreux.ses sont celles et ceux qui viennent de milieux populaires, sont immigré.e.s ou descendant.e.s d’immigré.e.s, ont grandi dans des zones d’éducation prioritaire. Leur attachement à l’émancipation par l’éducation et aux valeurs de la République est puissant et incontestable. Leur expérience du champ éducatif n’en est pas moins émaillée de nombreuses failles.

C’est par exemple le cas de cette jeune femme, noire, qui raconte la voix tremblante l’appréhension qu’elle ressentait, enfant, à chaque fois que son père, ouvrier immigré congolais, était « convoqué » par l’un.e de ses professeur.e.s. Ce qu’elle craignait c’était le silence de son père qui tentait de prouver à l’institution sa capacité à bien éduquer sa fille, d’affirmer son autorité pour échapper au stigmate du parent « démissionnaire ». Mais ce qu’elle lisait aussi dans les yeux et les remarques de certain.e.s de ses enseignant.e.s, c’était le malaise teinté de mépris ou de paternalisme, lorsqu’il.elle.s lui avouaient craindre que son père, plus qu’un autre père, ne la frappe pour la punir.

Ce qui se joue dans ce type de situation, c’est une domination classiste, doublée d’une interprétation culturaliste des rapports de genre, lesquelles informent sur la manière dont, en tant qu’enseignant.e, on se représente le rapport aux familles dans leur diversité. Ce qui se joue donc, c’est la manière dont classisme et racisme s’entrecroisent pour renforcer la violence symbolique de l’institution scolaire, qui peut s’exercer de manière insidieuse, non intentionnelle, au quotidien, dans des situations de la vie courante, et entraîner des souffrances.

Ce sont également des supports pédagogiques de formation qui nous ont amené.e.s à réfléchir. Par exemple, un manuel de préparation au concours de professeur.e des écoles de 2015 (celui des éditions Nathan)[3] érige l’anecdote suivante en situation type, dans le cadre d’une réflexion sur l’égalité des sexes :
« Vous êtes professeur (e) dans une école dite « de quartier ». Quelles sont vos réactions si le père d’un de vos élèves de CM1, originaire d’un pays méditerranéen, fait bruyamment irruption dans l’école et exige, dans un français approximatif mais vigoureux, d’être reçu par « le » maitre de son fils. Or, le maitre est une maitresse… »

Retrouvez la suite de cet article sur le site de CONTRETEMPS.

 





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